Une semaine dans la peau d’un cycliste du quotidien
Par Stéphanie Besson
Retrouver ici l’article de la Revue N° 5 en version longue
Malgré l’hiver, des vélos parcourent les rues du Grand Briançonnais. Les motivations sont diverses : entrainement sportif intégré à sa journée, gain de temps, bien-être, conscience écologique…. Toutes les raisons sont bonnes pour supporter les conditions climatiques ainsi que les désagréments d’aménagements. Cependant ces aléas ne semblent pas les plus problématiques au dire des cyclistes réguliers. Les rues de Briançon révèlent au jour le jour une face cachée : des tensions avec les autres usagers des routes.
De telles déclarations ont attisé ma curiosité alors pendant une semaine j’ai enfourché mon vélo sur Briançon pour me mettre dans la peau de celles et ceux qui en font au quotidien. Sur les routes, j’ai découvert la liberté de rouler mais aussi les tensions avec les autres usagers.
LUNDI : J’accompagne mes enfants à l’école. Deux sont dans la carriole, un a son propre vélo. Je pars du Pont de Cervières. D’autres enfants et parents sont venus en skate, à pied et en vélo. Venir sans véhicule désengorge l’école et permet aux enfants de prendre l’air avant de devoir se concentrer en classe.
MARDI : Je pars faire mes courses dans la zone commerciale sud. Certains commerçants me regardent amusés en train de charger ma carriole. Il n’est pas évident de trouver un rack pour accrocher levélo mais un poteau fait l’affaire. Le retour à mon domicile est difficile dans les montées. Il paraît qu’après quelques jours, le corps s’habitue à l’effort et qu’on ne transpire plus.
MERCREDI : Je passe par le centre-ville. Bouchon pour les voitures. Vive la liberté à vélo ! Je double une voiture. Celle-ci me redouble en trombe avec un bras d’honneur ! A priori, il y a plusieurs box sécurisés en ville mais je préfère les gare-vélos pour être au plus près des lieux où je dois me rendre.
JEUDI : Je vais chercher une pizza. La nuit tombe. Je mets lumières et gilet fluorescent. Je remonte la rue Pasteur dans la voie cyclable qui est à contre-sens de la circulation automobiliste. S’ensuit un slalom entre le trottoir, les trous, les piétons, les voitures. Ma pizza est toute secouée et moi avec !
VENDREDI : Je me motive pour un concert au Laus.La route est belle mais penser à se protéger les oreilles. Des motos débouchent dans les virages, me font face ou me doublent, me frôlent. Le concert va commencer. Et, je me retrouve à pédaler au diapason avec plusieurs autres volontaires sur une installation astucieuse qui vise à produire l’électricité nécessaire à alimenter la scène. Le concept semble plaire aux artistes tout comme aux spectateurs. Petits et grands se succèdent sur les selles avec le sourire.
SAMEDI : Objectif rando dans la vallée de la Clarée. Je pars de Saint Blaise. Le premier rond-point à traverser se passe sans trop de difficultés. J’emprunte la jolie voie nouvellement aménagée le long de la Durance…puis plus rien. Je ne sais comment traverser ! Pas de signalement au sol, de voie protégée ni signaux de fumée ! Je remonte la rue centrale. La voie cyclable à contresens est mal signalée. J’essuie klaxons, insultes et évite de justesse un jet de lave-glaces mal intentionné. Nouveau rond-point sans protection. Etape suivante : Champ de mars – La Vachette. Dangereux ! Il n’y a pas de voie protégée alors que la circulation est intense. Me voilà enfin au bord de l’apaisante Clarée.
DIMANCHE : au programme, baignade à Eygliers. Train + vélo. C’est la combinaison parfaite même si le prix du billet reste élevé. Un espace dans le train est prévu pour les vélos. Lundi, j’irai à l’atelier cyclonique pour apprendre à changer mes roues et régler mes freins toute seule. Autonomie !
En faisant le point sur cette immersion, je constate que le partage apaisé de la voirie reste un défi à relever pour notre territoire. Mais loin d’être impossible avec celles et ceux qui pratiquent au quotidien et les structures qui s’engagent pour (Atelier Cyclonique, Mobil’Idées, etc.).
Quelques pistes pour favoriser la vie des cyclistes
Faciliter et sécuriser l’usage du vélo en centre-ville : une signalétique plus claire, une sécurisation des carrefours, des rues étroites et à contre-sens ; prévoir des parcours alternatifs réels pour ne pas gêner les automobilistes.
Développer la combinaison « transport en commun -covoiturage et usage du vélo» au quotidien